« Dans ce 21ème siècle, le train du progrès est en train de quitter la station, et sera d’ailleurs probablement le dernier train à quitter la station Homo Sapiens. Ceux qui ratent le train n’auront jamais de deuxième chance »

Yuval Noah Harari, Homo Deus (2016)

 

Dans son dernier best-seller, l’auteur israélien Yuval Noah Harari évoquait sans concessions l’importance révolutionnaire de l’intelligence artificielle (IA). Quatre ans plus tard, son discours n’en est que plus porteur : l’IA s’est désormais infiltrée dans quasiment toutes les strates de la société.

Devant ce fait, la plupart des États n’ont pas perdu de temps pour s’emparer de cette technologie disruptive, et mettre en place des cadres règlementaires. L’UE n’échappe pas à la règle.

L'Europe passe à l'action

En avril 2018, 25 pays européens signèrent une ‘Déclaration de coopération sur l’intelligence artificielle’, suivie en décembre de la même année par un plan coordonné présentant les objectifs et actions de l’UE en matière d’IA. Quelques mois plus tard, en février 2019, le Parlement européen adopta une nouvelle résolution portant sur une politique industrielle européenne de l’IA. La nécessité de mettre en place un cadre juridique rigoureux fut particulièrement mise en avant.

Enfin, en termes de régulation, le RGPD (Règlement Général sur la Protection des Données) fut implémenté le 25 mai 2018. Reflétant l’article 8 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union Européenne, cette législation est considérée comme la plus onéreuse au monde. Elle accorde aux citoyens européens un certain contrôle sur leurs données personnelles : le droit au consentement pour l’obtention des données par un tiers-parti, ou encore la possibilité d’accéder à leurs données personnelles et de les supprimer.

Or, malgré ces efforts, beaucoup ont questionné le modèle européen vis-à-vis de l’IA. Kai-Fu Lee, ex-président de Google Chine et expert en IA, déclara notamment en décembre 2018 qu’il doutait très fortement que l’UE puisse obtenir « même une soi-disant médaille de bronze dans cette compétition ». En accord avec ces pensées, le chercheur français Nicolas Miailhe mettait en avant, la même année, que l’UE était sur le point de devenir un « Etat-vassal » en IA face aux leaders américains et chinois.

Ainsi, c’est dans ce cadre que la Commission Européenne publia, le 19 février 2020, un livre blanc présentant une stratégie revisitée vis-à-vis de l’IA. Celui-ci fut également accompagné d’un plan plus spécifique quant aux données, ainsi que d’un plan relatif à la sécurité et la responsabilité des produits comportant de l’IA.

Que retenir ?

La législation européenne est de plus en plus poussée. Du principe de précaution vis-à-vis de l’IA qui gouvernait largement les réflexions de la Commission en 2018, nous sommes passés à la mise en place d’un véritable cadre réglementaire, clairement défini.

 

La nouvelle vague de données est une opportunité pour l’Europe. Auparavant largement centrées sur les consommateurs, les données vont être de plus en plus exploitées dans les secteurs publics et de l’industrie. Tandis qu’elle accusait un temps de retard conséquent en matière de données personnelles (exploitées quasiment exclusivement par les GAFA), l’UE a une longueur d’avance en matière de données non-personnelles du fait de l’étendue de ses secteurs publics et industriels.

 

Tandis que dans ses premiers documents la Commission plaçait l’éthique au-dessus des préoccupations de compétitivité, l’éthique est désormais perçue comme sous-tendant la compétitivité européenne. Il n’y a pas de marché européen dynamique sans confiance des citoyens.

 

Après prise en compte des consultations publiques de son livre blanc, un plan d’action concret et de nouvelles législations seront proposés par la Commission d’ici peu.

Conclusion

La Fondation l’IA pour l’école continue de suivre le projet européen pour l’intelligence artificielle et le rôle qu’elle va jouer dans nos vies quotidiennes. Nous restons convaincus que le citoyen de demain doit être informé et familiarisé avec ces technologies en vue de développer un esprit critique nécessaire au monde d’aujourd’hui.